Les soins obligés existant en droit pénal français
depuis près d’un demi-siècle, n’ont pris une réelle signification
qu’avec le développement récent des sanctions alternatives à
l’emprisonnement, ceci obligeant les professionnels concernés que ce soit
dans le domaine judiciaire ou dans le domaine médical, à y porter une grande
attention. L’obligation de soins(ODS) est l’obligation particulière la
plus prononcée dans le cadre d’une mise à l’épreuve, et les
probationnaires qui ont été jugés pour une infraction sexuelle y sont
soumis dans ¾ des cas (1).
L’organisme administratif qui gère le contrôle du
sursis avec mise à l’épreuve est le Service Pénitentiaire d’Insertion
et de Probation (SPIP). Ses travailleurs sociaux sont là pour vérifier
tout au long du sursis avec mise à l’épreuve le bon respect des différentes
obligations , dont l’obligation de soins. Automatiquement un échange
naît entre les médecins soumis à leur déontologie, et le SPIP mandaté par
le juge d’application des peines d’apporter la preuve de ce contrôle et
de son efficacité ou de son échec. Ici s’appréhende la complexité de la
délicate articulation de deux logiques différentes : celle des soins et
celle de la peine. Selon X. LAMEYRE " reconnaître la possible fécondité
de ce type de soins n’est pas synonyme d’affranchissement déontologique. "(1).
Ce travail porte sur les échanges d’information médicale
entre thérapeute et service pénitentiaire d’insertion et de probation dans
le cadre du contrôle de l’obligation de soin de la population ayant été
condamnée à une peine de sursis avec mise à l’épreuve suite à une
condamnation pour agression sexuelle, effectuée par le service pénitentiaire
d’insertion et de probation de la ville d’Angers à la date du 15 mai
2002, ainsi que les questions déontologiques en découlant.
Le service pénitentiaire d’insertion et de probation ;
recherche dans les circulaires ministérielles des directives concernant
l’application et la surveillance spécifique de l’obligation de soins :
Le SPIP est sous le contrôle du ministère de la justice.
Trois circulaires ministérielles explicitent les pouvoirs et les devoirs de
ce service, ainsi que les moyens ou les méthodes qu’il doit utiliser pour
remplir ses fonctions. Elles décrivent les relations qui doivent exister
entre le SPIP et ses partenaires, ainsi qu’entre le SPIP et le magistrat
mandant dans le cadre du contrôle des condamnations de sursis avec mise à
l’épreuve. L’intérêt est de rechercher les directives ministérielles
à l’égard du SPIP concernant l’application du contrôle des obligations
et de voir s’il est reconnu une spécificité du contrôle de l’obligation
de soins.
CIRCULAIRE du 5 octobre 1999 (NOR JUSE9940065C)
relative aux missions des services pénitentiaires d’insertion et de
probation et à leurs relations avec les autorités judiciaires. Aucune partie
n’est développée sur l’obligation de soin et son contenu.
Le décret N°99-276 en date du 13 avril 1999 modifie le
code de procédure pénal pour la création du SPIP .
" En application de l’article D.575 du CPP et
sous l’autorité du directeur du service, le travailleur social du service pénitentiaire
d’insertion et de probation doit s’assurer que la personne suivie en
milieu ouvert respecte les obligations qui lui sont imposées. "
" Dans ce cadre, comme dans celui plus général
de la transmission des rapports de comportement, les documents couverts par le
secret professionnel - c’est-à-dire contenant des renseignements sans
rapport avec l’exécution du mandat judiciaire, et recueillis par voie de
confidence - ne peuvent pas être transmis au magistrat. "
" Le travailleur social est soumis au secret
professionnel comme tout fonctionnaire, il a l’obligation de dénoncer les délits
et les crimes dont il a connaissance… "(2)
CIRCULAIRE du 27 décembre 1999 (NORJUSE9940287C) relative
aux relations des services pénitentiaires d’insertion et de probation avec
les autres services pénitentiaires et leurs partenaires.
Dans cette circulaire, la définition du dossier
d’insertion et de probation est aussi présente. Il est notifié qu’il
doit être commun au milieu ouvert et au milieu fermé. Il est soumis à
certaines règles spécifiques de confidentialité . Il n’est pas
accessible par les fonctionnaires des autres services de l’établissement pénitentiaire.
Les documents couverts par le secret professionnel ne peuvent être consultés
que par un agent du SPIP.
En application du principe posé par l’article 21 de la
circulaire AP.85.31.G1 en date du 13 novembre 1985 relative à la
communication aux détenus des documents administratifs, le détenu peut avoir
accès à son dossier d’insertion et de probation, toujours en présence et
par l’intermédiaire d’un des membres du SPIP , en excluant les
documents portant atteinte à la sécurité publique et notamment à la sécurité
des personnes et des établissements ou à la protection de la vie privée
d’une personne autre que le détenu (3).
La CIRCULAIRE du 21 novembre 2000(NOR JUSE004086C) ,
relative aux méthodes d’intervention des travailleurs sociaux des services
pénitentiaires d’insertion et de probation , doit être considérée
comme un outil méthodologique. Dans son sommaire, aucune partie n’est
consacrée à l’obligation de soin, à son application, ou à son contrôle.
Le développement des écrits à travers les dossiers prévus
par l’article D.580 du CPP doit être à jour et utilisable par tous ses
membres. Le dossier doit contenir en milieu ouvert des rapports semestriels
d’évaluation, ponctuels de situation, de fin de mesure, de liaison. Une
grande objectivité est indispensable dans leur rédaction car le
probationnaire peut consulter le contenu de ces rapports selon la circulaire
NORJUSE9940287C du 27 décembre 1999. Les règles européennes demandent une
plus grande transparence du dossier individuel des personnes, la
recommandation R (62)16 adoptée par le Conseil des ministres de l’Europe le
19 octobre 1992 dispose que " le délinquant ou une personne
agissant en son nom doit avoir accès à son dossier individuel à condition
qu’il n’y ait aucune atteinte au respect de la vie d’autrui. Le délinquant
doit avoir le droit de contester le contenu du dossier ".
Il est demandé au travailleur social d’induire une réflexion
sur la responsabilité du condamné à l’égard des actes qu’il a commis,
dès lors qu’il s’en reconnaît l’auteur (4).
Ces circulaires mettent en avant l’importance du travail
du travailleur social dans le contrôle des obligations du probationnaire. En
ce qui concerne l’obligation de soins, aucune directive spécifique n’est
retrouvée. Par contre de nombreuses directives générales sur le contrôle
des obligations conviennent parfaitement à l’obligation de soins :
l’harmonisation des suivis, l’adaptation individuelle, l’objectivité
dans les écrits, le respect de la confidentialité des informations, le droit
au délinquant de disposer du dossier du SPIP rentrant en résonance sur le
plan médical avec le droit à l’information chez le patient dans la loi du
4 mars 2002. Il est demandé au travailleur social d’avoir des connaissances
dans le domaine social, judiciaire, médical. Il doit posséder une grande
capacité d’écoute et d’analyse, des disposition à la communication tout
en sachant respecter la confidentialité . Il ne doit pas juger mais de
savoir alerter le magistrat mandant quand apparaissent des signes objectifs de
non respect des obligations. Ces qualités et ces fonctions demandent d’être
explicitées de façon précise à travers des écrits, d’être discutées
et mises en pratique dans des formations promulguées à l’égard des
travailleurs sociaux.
Les droits du probationnaire en corrélation aux droits du
malade à travers la loi du 4 mars 2002 : (5)
Cette loi présente plusieurs points intéressants dans le
cadre de l’obligation de soins. Il n’y est jamais fait mention de
l’obligation de soins de façon spécifique, mais à aucun moment
l’obligation de soins n’est citée comme une exception dans les différents
articles de loi sur les droits aux malades, entraînant alors une
non-application de ces écrits dans ce contexte spécifique de prise en charge
thérapeutique. Il faut donc considérer que les articles de loi suivant sont
à respecter dans l’obligation de soins et dans son contrôle.
Un rappel est fait concernant le devoir de secret
professionnel et les conséquences encourues lorsque celui-ci est violé.
(Art L.1110-4)
Le probationnaire est un sujet actif à part entière, il
choisit son thérapeute et type de thérapie qu’il va suivre. Il peut
refuser le soin, et celui-ci ne peut alors lui être imposé.
(Art.L.1111-4)
Le probationnaire a le droit de désigner une personne de
confiance qui peut assister aux consultations et l’accompagner dans ses démarches.
(Art.L.1111-6).
Il peut accéder à la totalité des informations médicales
le concernant, soit directement, soit à sa demande par l’intermédiaire ou
avec l’assistance d’un médecin qu’il nomme. (Art.L.1111-7)
La loi du 4 mars 2002 semble pouvoir éclairer les rapports
entre le travailleur social et le médecin, les droits des probationnaires, et
les obligations propres aux travailleurs sociaux et celles propres au corps médical.
Elle vient, en ne nommant pas le probationnaire et l’ODS comme une
exception, affirmer l’absence de restriction des droits du probationnaire
concernant sa santé par rapport aux droits du citoyen commun n’ayant pas
d’ODS.
La CONFERENCE DE CONSENSUS du 22 et 23 novembre 2001 sur
" psychopathologie et traitements actuels des auteurs d’agression
sexuelle. " (6) cite spécifiquement l’ODS dans un paragraphe.
L’attestation du contrôle doit se faire à travers la présentation de
certificats. L’avis sur le contrôle de l’ODS se limite à ce consensus.
Le SPIP d’Angers suivait au mois de
mai 2002 101 personnes dans le cadre d’une peine de sursis avec mise à l’épreuve
ayant une obligation de soins pour des faits concernant des agressions
sexuelles.
TYPE DE PEINE PRONONCEE SELON LE DELIT COMMIS
Suivant la gravité du passage à l’acte et le statut de
la victime, la peine prononcée sera différente. Elle se répartira en sursis
avec mise à l’épreuve simple, condamnation à une peine ferme
d’emprisonnement associée à une durée de sursis avec mise à l’épreuve.
- Agression sexuelle sur majeur entraîne dans la majorité des cas un SME
simple (60%), et 28% de SME mixte.
- Viol : 50% de SME mixte et 50% de peine ferme uniquement.
- Agression sur un mineur de 15 ans , les SME mixte représente 91%.
- Agression sur mineur de moins de quinze ans : 69 % SME mixte et 23%
de SME simple.
- L’exhibitionnisme :87% de SME simple et 13% de SME mixte.
DUREE DES PEINES D’OBLIGATION DE SOINS
La durée de l’obligation de soins est de trois ans dans
53% des cas et de deux ans dans 26% des cas. Elle est inférieure à un ans
que dans 2% des condamnations. Lorsqu’elle dépasse trois ans, elle
correspond à une accumulation de peine de sursis dans le cadre de récidive.
DUREE DES PEINES D’EMPRISONNEMENT
Elle est comprise entre un ans et trois ans dans 62% des
cas, le minimum est de deux mois (5%), le maximum est de cinq ans dans 2% des
cas.
TRANCHE D’AGE PARMIS LES AGRESSEURS SEXUELS
Les plus représentés sont les sujets entre 41 ans et 50
ans avec 26%, ensuite les 31-40 avec 25%,puis les 51-60 avec 19%, et enfin les
20-30 avec 17%. Les sujets entre 61 et 70 ans représentent 9%, et les plus de
71 ans 4%. Donc plus de 50% des agresseurs sexuels ont entre trente et
soixante ans.
SITUATION PROFESSIONNELLE
47% ont un emploi, 32% sont en recherche d’emploi, 16% de
retraité, enfin 5% en formation. On peut dire qu’en grande majorité
l’agresseur sexuel a un emploi ou en recherche durant son suivi par le SPIP.
Parmi les professions les plus retrouvées dans les dossiers, les emplois dans
les transports et les emplois de nuit dominent. Ce type de travail respecte
mal les cycles sommeil/veille, favorise la solitude et l’absence de
communication. Les emplois aux conditions difficiles entraînant une certaine
désocialisation, ainsi que les périodes de perte d’emploi, sont retrouvés
chez les sujets au moment où il commette leur passage à l’acte.
NIVEAU D’ETUDE
32% de cette population a un niveau de formation CAP/BEP,
27% niveau BEP, 13% CAP, 7% niveau BEPC, 7% collège, 7% primaire, 7% ont le
baccalauréat. Cette population a donc en majorité une formation de type
professionnelle plutôt qu’un cursus classique, pour aboutir à un métier
de type manutentionnaire ou manutentionnaire qualifié.
Les données médicales ont été récupérées sur
soixante dossiers.
1.LE CERTIFICAT MEDICAL
C’est une attestation qui doit être fournie à la
demande de la personne consultant pour prouver le respect de son obligation de
soins. Ceci semble être le seul moyen officiel, préconisé par le corps médical,
et demandé par le corps judiciaire, pour permettre un contrôle de cette
obligation. Aucune autre consigne, directive n’est retrouvée dans les
textes de loi soit du code pénal, soit des circulaires ministérielles
concernant le SPIP, ou encore dans les consensus médicaux.
Il ne peut être directement demandé par le travailleur
social au thérapeute, et le thérapeute ne peut le fournir spontanément au
SPIP. L’ensemble des certificats contiennent systématiquement le nom et prénom
de la personne s’étant présentée à la consultation, la date de la rédaction
de ce certificat. Il certifie la présence de l’individu, mais ne rend pas
compte du contenu de la consultation, de la participation réelle au soin. Il
ne contient pas d’information médicale. Ce certificat est soit fait pour
une consultation, soit couvre une période de suivi.
Sur les 60 dossiers, il est retrouvé des certificats dans
49% des cas ; alors ils sont en grande partie réguliers. L’absence de
certificat, ne veut pas dire obligatoirement absence de soin, car plusieurs
dossiers sans certificat contiennent des informations sur le suivi médical
qui semblent soit être rapportées par le sujet soit dues à des échanges téléphoniques
avec le médecin traitant. Le certificat est rédigé par différents
professionnels : psychiatre, médecin généraliste, psychologue,
infirmier de psychiatrie, infirmier en centre d’alcoologie.
Enfin, le certificat semble actuellement le seul témoin en
partie fiable d’une prise en charge en soins mais il présente des limites.
Le temps de réponse entre la non-présentation du certificat et les conséquences
réelles judiciaires étant long, ceci ne rend pas persuasif ce contrôle pour
le sujet. Un cadre plus strict devrait être mis en place : quels sont
les professionnels qui peuvent le rédiger, fréquence précise de présentation
de certificat. Par contre, l’absence d’information médicale dans le
certificat doit être maintenue, dans le respect du secret médical.
2.FREQUENCE DES CONSULTATIONS
La fréquence des consultations est soit donnée par le
sujet, soit prouvée par la date des certificats, soit notifiée sur le
certificat. Nous retrouvons 36% une consultation par mois, 28% une
consultation toutes les deux semaines, 20% une consultation tous les trois
mois, 8% une consultation par semaine, 8% de consultation irrégulière. Les
consultations faites une fois par semaine et une fois tous les 15 jours sont
faites soit par un psychiatre soit par un psychologue, celles tous les trois
mois en majorité par un psychiatre, celles une fois par mois par la majorité
des généralistes, ainsi que par les autres intervenants.
En ce qui concerne les consultations irrégulières, il
n’y a pas de prédominance retrouvée selon un type de thérapeute.
On peut penser que les personnes qui ont une consultation
par semaine ou tous les 15 jours sont dans une prise en charge de type
psychothérapie d’inspiration psychanalytique voir en psychanalyse, ceci
semble en rapport avec une démarche volontaire d’effectuer un travail sur
soi.
Il ne faut pas entendre par là qu’un suivi plus espacé
est inadapté : une prise en charge de type psychanalytique n’est pas
indiqué de façon systématique et pourrait même être néfaste dans le cas
d’une erreur d’indication.
L’importance de la régularité des consultations est à
mettre en avant ; elle est le reflet d’un certain engagement de la
personne dans son suivi, et de la consolidation du lien entre le sujet et son
thérapeute, cette prise en charge s’inscrit alors dans son histoire comme
une période de sa vie, et non comme un événement incidentiel.
Il est à noté que les prises en charge par les médecins
généralistes sont toutes régulières, et en majorité tous les mois. Il est
vrai qu’ils ne communiquent pas ou peu avec les travailleurs sociaux, et
qu’ainsi ils ne sont peut être pas au courant de la raison de
l’obligation de soin . En tout cas, la relation entre le sujet et son
thérapeute se consolide par la facilité que peut avoir le sujet à se
confier ou s’adresser à son médecin de famille, mais il peut aussi tromper
plus facilement son médecin généraliste et le laisser dans l’ignorance
par rapport à la réalité des faits commis. Il faut donc notifié l’intérêt
d’informer le médecin sur l’obligation de soin, voir lui proposer un
certain travail en équipe avec la psychiatrie sectorielle.
3.TYPE DE PRISE EN CHARGE
Le sujet a actuellement la liberté de choisir par qui son
obligation de soin va être faite. La liberté de ce choix n’est et ne doit
pas être remise en cause fondamentalement. Mais le questionnement se pose sur
la qualité de la prise en charge, la compétence de l’intervenant, sa
connaissance dans le domaine des agresseurs sexuels. Une prise en charge
pluridisciplinaire semble enrichissante et permet des outils thérapeutiques
variés.
Dans 64% des cas, le suivi est effectué par un médecin
psychiatre, 16% un psychologue, 13% un généraliste, 5% un centre
d’alcoologie, 2% un infirmier. Tous les psychologues, ainsi que
l’infirmier, font parti d’une structure psychiatrique sectorielle public,
parmi les psychiatres, 34,29% sont des médecins libéraux.
Les psychiatres libéraux communiquent facilement par téléphone
avec les travailleurs sociaux, les structures psychiatriques sectorielles de
façon moindre, et enfin ce sont les médecins généralistes qui ont presque
aucun rapport téléphonique.
La problématique d’une alcoolisation chronique parmi les
personnes condamnées est fréquente, mais par ailleurs on ne peut s’arrêter
sur l’idée que seul la consommation d’alcool serait responsable de
l’agression sexuelle. Le problème d’exogénose doit être pris en charge
sur le plan médical car il est reconnu comme étant un facteur de risque de récidive
majeur. A l’opposé, il faut savoir que pour la majorité des agresseurs,
cet état d’ébriété soit au long cours, soit au moment de l’agression,
leur permet de dire qu’ils n’étaient pas eux même, en conséquence
diminue voir annule leur responsabilité dans leur acte. De plus, se focaliser
uniquement sur l’alcool, entraîne l’économie chez le sujet du
questionnement sur son passage à l’acte. La prise en charge en centre
d’alcoologie est manifestement une nécessité, et n’est pas assez fréquente
vu la fréquence d’alcoolisme chronique dans cette population, mais elle
n’empêche pas d’effectuer une prise en charge sur un axe psychothérapeutique
spécialisé.
L’intérêt d’un réseau de soins est manifeste car
chaque professionnel a une place propre, indispensable, et non
interchangeable.
4.EXPERTISE :
Cinq thérapeutes ont demandé l’expertise psychiatrique
contenue dans le dossier du SPIP , pour être au courant des faits
reprochés, de l’analyse de l’expert, ceci apportant un éclaircissement
à la situation. Cette demande est toujours faite avec l’accord du patient,
en retour il est prévenu par courrier par le travailleur social de cette
demande et de la transmission de l’expertise. Seul des psychiatres et un
psychologue par l’intermédiaire de son chef de service, ont fait cette démarche.
aucun refus n’est à noter de la part du sujet, on peut se poser la question
de savoir sur le plan juridique qu’elle est la légalité de la transmission
de cette pièce avec l’accord mais aussi dans le cas où le condamné s’y
opposerait.
5.DONNEES D’ORDRE MEDICAL RETROUVEES DANS LES DOSSIERS
Ces données médicales sont soit notées par le
travailleur social sur les fiches de suivi, soit proviennent de documents
joints photocopies ou originaux. Il les récupère à travers les discussions
téléphoniques avec le thérapeute qui suit le sujet, ou ce sont directement
les dires du sujet.
Sur 60 dossiers, quinze contiennent des renseignements
apportés par le thérapeute au cours de discussions téléphoniques. On
retrouve l’état psychiatrique, l’évolution psychiatrique, voir
d’autres informations médicales que celles concernant l’obligation de
soin. 1/6 contiennent le traitement pris par le sujet avec la posologie ;
cela concerne surtout des traitements oraux, uniquement deux traitements
injectables retards.
Parmi les pièces médicales : courrier avec compte
rendu de consultation fourni par le thérapeute, résultat biologique
original, photocopie d’ordonnance. Tous ces renseignements sont les preuves
que peut apporter le travailleur social au magistrat mandant pour confirmer le
respect de l’obligation de soin ou au moins sa bonne surveillance. Aucune
circulaire ne notifie quelles pièces médicales doivent être conservées ou
le contraire, dans le dossier. Par contre, il est demandé au travailleur
social la plus grande objectivité dans ses écrits, et le respect du secret
professionnel entraînant la non-transmission des informations ne concernant
pas directement le sujet, ou n’ayant aucune utilité dans le bon contrôle
de ces obligations, au juge d’application des peines.
On peut penser que si dans le consensus de novembre 2001,
il est clarifié le fait que le juge d’application des peines ne puisse être
renseigner sur l’état psychiatrique du sujet qu’en ordonnant une
expertise, alors toute information médicale apportée au dossier du SPIP doit
être succincte, fourni par le sujet, ne pas comporter de précisions médicales
en réalité inutiles pour le contrôle. Les communications entre le médecin
et le travailleur social sont aussi litigieuses ; elles ne doivent
concerner que la stricte information nécessaire à apporter la preuve d’un
suivi de l’obligation de soin correct, en même temps ces échanges sont le
reflet de la réalité de cette relation entre médecin et corps judiciaire ;
elle est présente, doit être impérativement conservée, mais demande de
filtrer une partie des informations pour garantir l’intégrité de la déontologie
médicale. La qualité du travail des travailleurs sociaux n’est aucunement
remise en cause ,dans le flou des directives qui leur sont apportées,
ils répondent de façon individuelle à ce contrôle, par un flot
d’information.
CONCLUSION
La collaboration entre le corps médical et le service pénitentiaire
d’insertion et de probation est indispensable dans la mise en place de
l’obligation de soins chez les agresseurs sexuels. Elle doit passer par une
harmonisation des moyens de contrôle et de suivi effectué par le travailleur
social, ainsi que par la plus grande objectivité dans les écrits. Les données
médicales annotées dans le dossier du probationnaire doivent concerner
uniquement cette personne et la prise en charge thérapeutique s’inscrivant
dans l’objectif de l’obligation de soins. Toutes informations médicales
apportant des précisions sur cette prise en charge n’ayant pas d’intérêt
dans le contrôle du suivi, ou sortant du cadre du suivi, ne doivent pas être
intégré dans le dossier. L’importance du certificat est à mettre en avant ;
en rappelant qu’il est obligatoire de fournir régulièrement cette pièce,
en cas de non-présentation, il est du devoir du SPIP d’en avertir
rapidement le magistrat mandant. Le flou entourant cette mesure obligatoire
doit être dispersé par une réflexion sur une structuration générale
stricte du contrôle.
Cette harmonisation et cette qualité du suivi ne s’arrêtent
pas uniquement aux travailleurs sociaux. Celles-ci concernent les thérapeutes
acceptant de prendre en charge des patients pour une obligation de soins.
Cette harmonisation ne doit pas aller à l’encontre de l’intervention de
différents types de thérapies mais oblige à une connaissance approfondie
des troubles psychiques en lien avec les passages à l’acte d’ordre
sexuel, de même à une formation continue dans ce domaine. Les échanges de
point de vue, ainsi que la prise en charge en équipe pluridisciplinaire, la
construction d’un réseau médical faisant intervenir psychiatres, médecins
généralistes, psychologues, infirmiers, est à promouvoir.
Il ne faut pas oublier que le probationnaire a des droits.
Le premier droit est celui d’être reconnu comme sujet, il est le réel
propriétaire des informations concernant sa vie et ainsi donc sa santé, nous
ne sommes que dépositaires de ses informations, autorisés soit par lui soit
dans une certaine mesure par la justice, celle-ci ne peut éthiquement élargir
son droit de regard à l’ensemble des informations concernant la vie de ce
sujet, mais doit se borner à celles utiles à son application. Enfin, ce
sujet a le droit de refuser les soins ; aucun thérapeute ne peut déontologiquement
soigner quelqu’un contre son gré, il est alors du ressort de la justice de
maintenir ou pas l’obligation de soin dans le cadre du sursis avec mise à
l’épreuve, et de sanctionner le non-respect des engagements pris par le
probationnaire lors de sa condamnation.
BIBLIOGRAPHIE